By Mummy B.
La rentrée est passée. J’espère que tout s’est bien passé pour vous et que, scolarisés ou non, vos enfants ont bien profité de leurs premiers jours de septembre. Pour nous, c’était notre deuxième non-rentrée et nous l’avons passé tous les cinq ensemble à Chicago, notamment à North Avenue Beach, puisque nous avons profité du week-end du Labor Day (prolongé par quelques jours de congés posés par Daddy B.) pour se faire un petit roadtrip vers Cleveland, Chicago et Cincinnatti. Nous fêtons donc notre premier anniversaire d’unschooling. Et c’était une belle année bien remplie!

Pour célébrer cette deuxième année sans école qui démarre, j’ai eu envie de répondre aux questions qu’on nous pose souvent concernant notre choix.
Ne pas scolariser ses enfants, c’est légal?
Cela dépend des pays. Dans certains pays, c’est interdit. Dans d’autres c’est un peu flou puisqu’il n’y a pas forcément de lois qui définissent bien le cadre imposé par les institutions en matière d’instruction des enfants. Et dans d’autres encore, assez nombreux, c’est autorisé (comme au Canada, aux Etats-Unis ou en France), mais avec plus ou moins de restrictions et de contrôles. Enfin il y a aussi le cas des pays qui obligent leurs citoyens à être scolarisés, mais laissent une certaine liberté (plus ou moins officiellement) aux expatriés qui résident chez eux. Le site de Home School Legal Defense Association est une source fiable, assez complète et plutôt bien mise à jour pour se renseigner sur chaque pays.
Pour quelles raisons voudrait-on que ses enfants n’aillent pas à l’école?
Nous avons pris la décision de ne pas scolariser nos enfants, mais il ne s’agit pas d’un choix « contre » l’école, mais « pour » une instruction libre. Si nous sommes conscients des points faibles de l’école et des aspects sur lesquels elle pourrait s’améliorer, ce n’est pourtant pas en opposition à cette institution que nous avons fait un choix différent pour nos enfants. D’ailleurs la décision pour Meryl a été prise assez tard, après une année de scolarisation à temps partiel en école maternelle privée (elle allait 3 matinées par semaine en preschool pour son année de Pre-K, l’équivalent de la moyenne section) durant laquelle nous avons pu observer comment elle évoluait dans cet environnement.

Si nous avions quelques réserves sur l’école (notamment en terme de rythme, car au Maryland les journées nous semblaient assez chargées et les vacances trop espacées), nous pensions malgré tout au départ la scolariser pour sa rentrée en Kindergarten (l’équivalent de la grande section, qui est la première année d’instruction obligatoire au Maryland). C’est un peu par hasard que nous avons réfléchi à l’option de l’instruction en famille et, notamment avec les possibilités et la liberté qu’offrait le unschooling, nous avons revu notre position.
Ainsi, nous avons opté pour une philosophie éducative qui nous a réellement enthousiasmé et qui est tellement différente qu’elle n’est simplement pas comparable à l’école. Nous avons voulu faire confiance aux dispositions spontanées de nos enfants et leur offrir la liberté et un environnement propice à évoluer, expérimenter, apprendre en se laissant porter par leur curiosité, leur enthousiasme, leurs jeux et leur besoin de communiquer. Chaque option a ses avantages et ses inconvénients et certains seront plus attirés par l’un que par l’autre. Les perspectives qu’offre le unschooling nous semblaient être les meilleures pour nos enfants et notre famille en fonction notamment de notre mode de vie et de nos personnalités.

Mais alors le unschooling, c’est quoi?
Instruction en famille, homeschooling, unschooling, apprentissages autonomes, non sco, école à la maison, worldschooling, home education, apprentissages informels, roadschooling… Il y a tellement de termes utilisés (d’autant plus quand on ajoute les termes anglais!) et de manières de faire différentes dans l’univers des enfants qui sont instruits en dehors du cadre de l’école que je ne pourrais tous les citer ici. Le unschooling, c’est un choix parmi d’autres un peu à l’opposé de ce qu’on s’imagine souvent de « l’école à la maison ».

Pour mettre d’accord tous ceux qui ont fait ce choix, on pourrait définir le unschooling comme un choix d’instruction basé sur les centres d’intérêt de l’apprenant et qui repose sur des apprentissages choisis par celui-ci. Mais de là, les manières de procéder peuvent être très différentes. Alors que certains prônent une absence totale de contenus formels et une autonomie entière des enfants, d’autres préfèrent proposer certaines activités (auxquels l’enfant n’aurait pas forcément penser de lui-même) et introduisent des moments plus formels d’apprentissages selon les envies de l’enfant.
De notre côté, nous n’avons pas de méthode absolue et nous oscillons en fonction des journées, de la disponibilité et de l’humeur de chacun entre des moments de liberté totale et des moments un peu plus cadrés. Nous n’avons donc pas d’emploi du temps, les seuls moments vraiment planifiés sont les éventuelles activités sportives et artistiques de Meryl (on espère trouver des activités pour Leighton aussi, mais jusqu’ici il était trop jeune). L’an dernier, elle a notamment suivi des cours de natation, de patins à glace, de peinture et participait au club d’échecs des enfants et aux rencontres LEGO de la bibliothèque. En dehors de cela, nos journées évoluent au fil de nos envies et des opportunités qui se présentent et en laissant une grande part au jeu libre et aux apprentissages informels.

Apprentissages informels, ça veut dire quoi?
Les apprentissages informels s’opposent aux apprentissages formels qui constituent la majorité des apprentissages faits à l’école. Ces derniers s’effectuent sous la direction d’un professeur qui définit pour ses élèves les objectifs, le programme et les méthodes d’apprentissage, les temps d’apprentissage et qui évalue et note lui-même les acquis de ses élèves. Le plus gros du travail de l’élève se fait attablé à son bureau à suivre des consignes ou écouter des leçons, prendre des notes ou effectuer des exercices sur papier.

Les apprentissages informels, c’est tout le reste. C’est profiter de chaque situation de la vie pour apprendre. C’est faire confiance à l’enfant et à son irrépressible besoin de progresser et d’apprendre qui l’habite depuis sa naissance. Dans ces apprentissages, l’adulte accompagne, soutient, épaule, encourage mais ne se positionne pas comme le professeur qui sait et qui enseigne. Tout comme on n’apprend pas à un enfant à marcher, on continue de lui faire confiance pour le reste de ses apprentissages en étant le pilier rassurant sur lequel il peut s’appuyer quand il en a besoin ou envie.

Les apprentissages informels font également partie de la vie des élèves scolarisés, mais en unschooling, on met l’accent dessus, on ne laisse passer aucune occasion, on saisit toutes les opportunités pour apprendre. Le quotidien est une source d’apprentissage très riche et s’y ajoute les sorties aux musées, à la bibliothèque, dans la nature pour développer encore un peu plus la curiosité de l’enfant. D’ailleurs le parent qui accompagne son enfant dans ses apprentissages est, lui aussi bien souvent, en position d’apprenant. C’est incroyable tout ce que nous avons pu apprendre ou nous remémorer avec plaisir durant cette année à s’interroger sur la météo, les animaux en tout genre, les différents métiers qui existent, les fêtes célébrées autour du monde, les volcans, les dinosaures, les moyens de transport, les tremblements de terre, le Moyen-Âge, la conquête de l’Espace…


Et en pratique, ça donne quoi?
Bien souvent les apprentissages informels sont transversaux. En partant de l’intérêt d’un enfant sur un sujet particulier, on aborde de nombreuses matières imposées en classe aux écoliers. On saisit la moindre activité, la moindre question pour aborder une notion ou en approfondir une autre. Faire la cuisine, par exemple, permet d’étudier facilement la chimie et la physique (on peut s’intéresser aux différents états de l’eau ou à des phénomènes comme la dissolution du sucre dans l’eau…), mais on en profite aussi pour faire des mathématiques (aux Etats-Unis on mesure notamment avec des tasses qui sont divisées en demi, tiers et quart), ou encore de la lecture (pour suivre une recette). Se promener dans la nature permet de faire de la biologie (collecter des feuilles, les comparer, chercher à quels arbres elle appartiennent, observer des insectes, étudier leurs similitudes et leurs différences) ou même de faire de la poésie ou de la musique si le coeur nous en dit (chanter « La gadoue » ou réciter « Chanson d’Automne » de Prévert). Quand on prend le bus, on fait des mathématiques (on décortique les nombres en centaines, dizaines et unités), de la lecture (pour lire les stations et ne pas louper la sienne) et on comprend le monde dans lequel on vit (en se renseignant sur le métier du conducteur ou en réfléchissant aux règles de sécurité routière). Quand on écrit une carte postale pour les amis ou la famille, on s’exerce à l’écriture, on aborde l’orthographe et la grammaire. Et en vivant aux Etats-Unis, on ne s’inquiète pas trop de l’apprentissage des langues vivantes (d’autant que Meryl comme Leighton aiment toujours apprendre de nouveaux mots ou expressions dans les divers langues que nous pouvons rencontrer).

Les sources d’apprentissages sont innombrables. Et si les situations pratiques sont bien entendu incroyablement riches et variées, nous nous appuyons aussi simplement sur les demandes des enfants : emprunter un livre sur un sujet particulier à la bibliothèque, aller visiter un musée, regarder un documentaire animalier, historique ou scientifique sur Youtube (où l’on retrouve la quasi totalité des « C’est pas sorcier! »), faire une recherche internet pour répondre à une question spécifique ou feuilleter les nombreux livres, magazines, encyclopédies et dictionnaires papier que nous avons à la maison.


Parfois des apprentissages un peu plus formels se font une petite place mais seulement si les enfants ont envie. Meryl était, par exemple, en demande de savoir lire et était frustrée de ne pas arriver à comprendre par elle-même comment il fallait s’y prendre. Nous avons donc cherché une méthode ludique mais qui avait fait ses preuves et avons opté pour la méthode des Alphas. Cela lui a beaucoup plu et a servi de base. Ensuite, c’est de nouveau en partant de ses centres d’intérêts que nous avons fait des lectures à deux voix sur des livres qui lui plaisaient (donc pas des livres spécifiquement élaborés pour des débutants). Son désir d’autonomie lui a ensuite donné envie d’avoir quelques livres à elle qu’elle pourrait lire sans notre aide et c’est donc à ce moment là que nous lui avons procuré des livres de lecteurs débutants (en anglais comme en français puisque son intérêt se portant sur les deux langues, elle a appris à lire simultanément l’une et l’autre).
Les enfants sont aussi parfois en demandent d’exercices plus classiques (papier-crayon) car ils trouvent cela amusant. Nous avons donc des ressources en tout genre pour répondre à leurs demandes (cahier de vacances ou feuilles imprimées avec des exercices assez scolaires, cahiers d’activités avec des exercices plus ludiques comme des mots croisés, labyrinthes, messages codés, coloriages). Parfois nous leur proposons d’en faire un peu (parmi d’autres activités possibles), mais nous n’imposons jamais puisque cela est contre-productif. Les études sur le cerveau ont prouvé qu’on apprend et retient mieux quand on est engagé et enthousiaste que lorsqu’on est contraint.

Et ce n’est pas trop compliqué d’être à la fois le parent et le professeur de ses enfants?
Cela l’est peut-être pour les familles qui font l’école à la maison au sens propre (quoi que je doute que ces familles tiendraient sur la durée si elles éprouvaient ce sentiment). Mais en unschooling, on ne se positionne pas comme un professeur. On n’adopte pas la position de celui qui sait et qui va enseigner à celui qui ne sait pas. On attend que son enfant développe un intérêt pour un sujet, se pose des questions et on l’accompagne pour trouver les outils pour y répondre.
Avec cette philosophie éducative, les enfants sont maîtres de leurs apprentissages. Nous, parents, ne sommes là qu’en accompagnateurs pour leur offrir un environnement suffisamment riche pour entretenir leur curiosité et les aider à trouver les outils, les ressources ou éventuellement les personnes pour répondre à leurs questions. Le but est qu’ils acquièrent un maximum d’autonomie, qu’ils gagnent en compétences d’apprentissage et en adaptabilité plutôt qu’en savoirs imposés. Il nous semble évident que le monde évolue si vite que ce qu’on apprend un moment donné peut vite devenir obsolète, désuet ou dépassé. Notre but est donc que nos enfants soient armés pour s’adapter à ce monde en perpétuelle évolution, qu’ils soient capables à terme de trouver par eux-mêmes les réponses à leurs questions, de faire appel à l’esprit critique qu’ils auront developpé au cours de ces années au lieu de penser que quelqu’un d’autre doit savoir mieux qu’eux-même et qu’ils se reposent ainsi sur d’autres personnes pour leur relayer l’information.


Si l’accompagnement demande un investissement très important de la part des parents sur les années maternelle et primaire (à 6 ans et 3 ans, Meryl et Leighton ont besoin, et pour un bon moment encore, qu’on leur lise les livres qui les intéressent, qu’on cherche avec eux sur internet, qu’on leur fournisse du matériel, qu’on les emmène en promenades ou en visites… qu’on les accompagne chaque jour sur son chemin d’apprentissage), les enfants devraient avoir acquis au niveau collège et lycée assez d’autonomie pour poursuivre avec plaisir, et non par contrainte, leur chemin d’apprenant, tout en nous sachant à leur disposition en cas de besoin.
On nous pose aussi souvent la question du manque de recul que l’on peut avoir vis à vis de son propre enfant, des exigences et des attentes que l’on peut avoir et donc de la pression que pourrait ressentir l’enfant, voire des tensions qui pourraient naitre dans la famille. D’abord, il ne faut pas oublier que cette pression n’est pas forcément absente pour les écoliers (et est sans doute même renforcée par la mise en concurrence des élèves induite par le système des notes). Ensuite en unschooling, il n’y a pas vraiment de pression puisque l’enfant apprend ce qu’il souhaite et à son rythme. Dans le cadre de l’école où un programme est imposé et les acquisitions régulièrement évaluées et notées, on place l’enfant dans la position d’un contenant à remplir de connaissances. Il peut y avoir une certaine pression car l’adulte est alors responsable du bon remplissage et le cadre scolaire impose des dates limites d’acquisition à valider. Alors que dans le unschooling, on envisage plutôt l’enfant comme une fleur qui va éclore. Certes, on ne peut la laisser à l’abandon, il faut en prendre soin, la mettre au soleil, l’arroser, mais si il est de notre responsabilité de lui prodiguer de bons soins, nous n’avons pas véritablement le contrôle sur la date d’éclosion, la forme ou la couleur des pétales. Cela appartient à l’enfant, on respectera donc le caractère unique de chacun.

Une citation d’Albert Einstein illustre assez bien cette différence fondamentale entre les deux philosophies éducatives : « Tout le monde est un génie. Mais si on juge un poisson sur sa capacité à grimper à un arbre, il passera sa vie à croire qu’il est stupide. » Ainsi nul besoin de mettre la pression à un enfant, on peut lui faire confiance pour trouver sa voie et y exceller.

C’est au final ce qui est sans doute le plus difficile au départ et qui peut amener des périodes de doute. En unschooling, le parent doit lui-même se déscolariser en sortant du mode de pensée scolaire. Il faut accepter sereinement qu’on n’a pas besoin de hiérarchiser les savoirs, d’imposer des échéances ou de contrôler les acquis puisque l’enfant naturellement va progresser et acquérir les connaissances qui l’intéressent et dont il a besoin.

Mais les enfants n’ont-ils pas besoin d’avoir des moments sans leurs parents et vice-versa?
Evidemment, à partir d’un certain âge, il est primordial que l’enfant (comme l’adulte) s’accorde des temps pour lui. Il n’est pas question de rester coller les uns aux autres en permanence. Le unschooling laisse une grande liberté concernant les activités en dehors du cadre familial (j’ai déjà cité plus haut les cours auxquels Meryl participait l’an dernier de manière récurrente, mais nous nous sommes également rendus souvent à des rencontres entre homeschoolers ou des ateliers plus ponctuels). Ce sont de très bonnes opportunités pour laisser l’enfant évoluer de son côté.

Dans notre organisation quotidienne, nous laissons aussi une grande place au jeu libre. Ainsi les enfants jouent dans le jardin, la salle de jeu ou s’occupent en autonomie sur leur bureau ou la table du salon pendant que je vaque à d’autres occupations. Si le jeu libre peut sembler au premier abord futile et accessoire, les avancées dans le domaine des neurosciences nous montrent qu’au contraire le jeu a une place essentielle dans le développement des enfants. Cela leur permet d’expérimenter, d’être créatif, de réfléchir à des stratégies de résolution de problèmes, de structurer leurs idées, de mettre en pratique leurs connaissances théoriques, mais cela leur demande aussi lors de jeux en groupe (et nous avons la chance d’avoir une belle fratrie de 3 enfants chez nous) d’exercer leurs habiletés sociales (partager, négocier, contrôler ses émotions, résoudre des conflits…).


Musées, films, jeux… c’est les vacances tous les jours alors?
Oui et non.
On ne transpose pas la structure et le cadre de l’école à la maison. Il n’y a pas d’emploi du temps, de récréations, de week-ends ou de vacances. C’est à la fois tout le temps les vacances et jamais les vacances. On ne s’arrête pas d’être curieux, on ne s’arrête pas de lire, de sortir, de faire des rencontres et des visites donc on ne s’arrête jamais d’apprendre.

Alors oui, il y a des journées où les enfants préfèrent rester en pyjama ou se déguiser en superhéros ou en princesse. Mais peu importe la tenue, la journée sera toujours mise à profit. Les enfants ne sont jamais oisifs. Ils ont à leur disposition tout ce qu’il faut pour alimenter leur désir d’apprendre et d’expérimenter. Du matériel de loisirs créatifs à foison, des kits d’activité en tout genre (dinosaures à déterrer, volcan qui reproduit les éruptions, système solaire à assembler, maquette de train et de bateau, fabrication de jouets traditionnels indiens… la plupart ayant été acheté lors d’un « vide-grenier » spécial homeschooling à des prix vraiment très bas), des livres et des jeux de société en tout genre, un peu de matériel Montessori et puis internet qui nous permet d’avoir accès à tout un tas de documentaires très bien conçus. Tout au long de la journée, les enfants se laissent porter par leurs envies, aucune journée ne se ressemble mais chacune apporte son lot d’apprentissages, d’expérimentations et de discussions passionnantes.

Globalement notre quotidien ressemble à celui de nombreux écoliers en vacances. Mais on entend souvent que les écoliers finissent par s’ennuyer au bout de 2 mois de vacances, que les grandes vacances d’été sont trop longues. Peut-être parce que dans ce moment de relâche, toutes les opportunités ne sont pas saisies pour entretenir la soif d’apprendre des enfants, alors que dans le cas du unschooling, comme nous ne nous reposons pas sur l’école, nous nous devons d’apporter à nos enfants un environnement toujours propice aux apprentisages et une disponibilité importante pour les accompagner dans leurs démarches, notamment les premières années. Peut-être également que certains enfants finissent à force de contrainte à l’école par voir les activités d’apprentissages diverses comme rébarbatives, ennuyantes et contraignantes. En unschooling, les enfants sont dans une dynamique positive concernant leurs apprentissages pusiqu’ils n’y vivent pas d’expériences désagréables (comme une mauvaise note ou une remontrance pour une leçon mal apprise, par exemple).

Comment être sûr que l’enfant va acquérir tout ce qu’il aurait appris à l’école?
Et bien justement, ce n’est pas forcément l’objectif. Bien sûr, le socle commun du niveau primaire sera forcément acquis par l’enfant. En effet, motivé par son besoin d’indépendance, il voudra de lui-même (et quand il se sentira prêt) apprendre à lire, écrire, compter…

Mais il est vrai qu’on peut observer parfois un certain décrochage au fur et à mesure que l’enfant grandit et que ses passions s’ancrent en lui. Bien souvent, on s’aperçoit que les enfants en unschooling peuvent commencer à se spécialiser dès le niveau collège. Il est possible que les unschoolers approfondissent plus volontiers les domaines qui les passionnent le plus et mettent de côté ce qui les intéresse moins. Cet élan est naturel et si l’école impose aux élèves d’être plutôt généralistes, on observe aussi dans les classes cette tendance qui sera d’autant plus prononcée au lycée avec le choix des filières (on entend souvent que dans la classe, il y a les « matheux » et puis les « littéraires », on finira par orienter les élèves en fonction de leurs résultats dans les différentes matières). Les petits unschoolers ont donc simplement la possibilité de se spécialiser un peu plus tôt, mais c’est sans contrainte qu’ils comprendront que certains savoirs leur sont indispensables dans la vie et qu’ils s’attacheront à les acquérir.

Donc vos enfants n’iront jamais à l’école?
En unschooling, on fait le choix d’écouter ses enfants avant tout. Si ils ont le désir de réintégrer l’école à un moment donné, c’est important de leur laisser cette possibilité. De même que si cela ne leur convient pas finalement, ils auront la possibilité de revenir à l’instruction libre. Par contre, tant que l’instruction en famille leur convient, nous ne prévoyons pas de les faire intégrer un établissement scolaire. Concernant leur futur, si ils souhaitent poursuivre des études supérieures, les universités accueillent très bien les élèves instruits en famille (sous la condition qu’ils réussissent les éventuels examens d’entrée) et leur taux de réussite en études supérieures est très bon.

Mais et la socialisation? Comment se faire des copains si on ne va pas à l’école?
La socialisation, c’est souvent la première objection qu’on pose aux familles ayant fait le choix de ne pas scolariser leurs enfants. C’est aussi sans doute le contre-argument qu’on balaye d’un revers de la main avec le sourire dès qu’on commence à expérimenter l’instruction libre. Dans l’imaginaire de beaucoup de personnes, l’école à la maison, c’est un enfant qui travaille comme à l’école mais avec sa maman qui joue à la maitresse et une vie en vase clos. C’est tellement éloigné des réalités multiples que peut revêtir le homeschooling qu’on finit même parfois par ironiser gentiment entre familles non sco à ce sujet.

Comment croire que le seul moyen de socialiser les enfants serait de leur imposer de partager un quotidien fait majoritairement de temps assis à un bureau à devoir suivre les consignes d’un professeur avec une trentaine d’autres enfants du même âge? C’est sûrement un moyen, certainement pas le seul! Les enfants non scolarisés ont de multiples occasions au quotidien de se socialiser. Encore une fois, la plupart des familles ne reproduisent pas le cadre de l’école chez eux. Cela n’aurait aucun sens de garder les contraintes de l’école en s’isolant du monde extérieur. C’est en fait tout le contraire qui est mis en place. En unschooling, on oublie en général les tables et les chaises, le tableau, les consignes, mais on s’ouvre au monde qui est notre cour de récréation géante et permanente.

L’instruction en famille, c’est aussi la possibilité de sortir à tout moment de la journée, de rencontrer plein de personnes d’âges différents et dans des situations différentes (d’autres homeschoolers, des enfants scolarisés, des enfants plus jeunes qui ne vont pas encore à l’école, des adultes de professions très différentes, des artistes, des artisans…), de visiter des musées, d’aller à la bibliothèque ou dans les aires de jeux, de participer à des ateliers ou d’assister à des spectacles, de s’inscrire à des activités sportives ou artistiques, de voyager… On a surtout le temps de prendre le temps parce qu’il n’y a pas d’heure de début ou de fin, parce qu’on peut trainer en soirée et dormir un peu plus le lendemain, parce qu’il n’y a pas de devoirs à faire ou de bain à prendre le soir car on n’aura pas le temps le matin…

Cela doit coûter très cher, non?
De nombreuses familles en IEF ont déjà fait des articles sur leur budget annuel et montré que cela n’est pas forcément supérieur au budget d’une famille qui scolarise ses enfants (et encore moins dans le cas de familles expatriées comme nous si on prend en compte les frais souvent exhorbitants des écoles françaises à l’étranger qui sont choisies par certaines familles). D’autant que de très nombreuses ressources ou activités sont gratuites (bibliothèque, ludothèque, aire de jeux, sortie dans la nature…) ou déjà incluse dans le budget de la famille (abonnement internet). Et on peut aussi se reposer sur les activités subventionnées par les collectivités locales. Pour nous par exemple, le county offre tout un tas d’activités extra-scolaires à des tarifs raisonnables. Cela a donc permis à Meryl de tester de nombreuses activités l’an dernier. Il ne faut aussi pas oublier le marché de l’occasion qui permet souvent de se fournir à prix réduits en matériel éducatif et jeux de société. Enfin nous essayons aussi parfois de partager avec d’autres familles certaines de nos ressources et ils nous en prêtent également en retour.

Le sujet m’intéresse, y a-t-il des livres ou des documentaires pour aller plus loin?
Parmi les pistes de réflexion, on peut citer comme introduction à ce qu’est le unschooling et comment il peut se traduire de manières différentes d’une famille à une autre, le film « Etre et Devenir » de Clara Bellar. N’hésitez pas regarder la bande-annonce et à vous procurer le film en VOD si il vous tente.
De nombreux livres traitent aussi du sujet comme ceux de John Holt (qui serait celui qui aurait utilisé pour la première fois le terme unschooling) dont « How children learn » (pas traduit en français) ou encore, en français « Les apprentissages autonomes ». Il y a aussi le super « Libre pour apprendre » de Peter Gray.
André Stern, trilingue à 10 ans et aujourd’hui compositeur, luthier, journaliste et écrivain, a écrit une chouette autobiographie « Et je ne suis jamais allé à l’école » et a sorti il y a quelques mois « Jouer : faisons confiance à nos enfants ». Il participe aussi à de nombreuses conférences dont certaines sont visionnables sur Youtube.
Et pour une lecture un peu différente « Une société sans école » d’Ivan Illich offre un regard critique intéressant sur l’éducation telles qu’elle est pratiqué dans les économies modernes.
11 Réponses
Julie
Merci pour cet article complet et pour les références, c’est très intéressant.
Eva B
Merci pour ton message. Je suis contente que ça t’ait plu. 🙂
Sophie B
Vraiment intéressant cet article. Ça fait réfléchir en tout cas
Eva B
Merci pour ton message. 🙂
ivan et françoise
coucou la grande famille,
et dire qu’il est plus ou moins question que l’école soit obligatoire dès 3 ans en France…
Ce n’est pas le moment pour vous de revenir vivre ici!!!
pleins de gros bisous de nous 4
Eva B
Coucou
Pour l’école obligatoire à partir de 3 ans, c’est un abus de langage des médias. Il s’agit toujours de l’instruction qui serait obligatoire à partir de 3 ans (les assos d’IEF en France y veillent 🙂 ). Mais pour l’instant, si le sujet a été lancé, rien n’est encore fait (et tant mieux, parce que les inspecteurs académiques ont bien autre chose à faire que de savoir si les petits non sco de 3 ans connaissent leurs couleurs ou compter jusqu’à 10… ^^ ). Mais en tout cas, pas de retour en France prévu pour nous pour le moment, mais on espère un retour en Europe dans les prochains mois. 🙂 On espère que tout se passe bien pour vous. Bisous de nous 5.
Kelly Cameron
Hello, we are a family from New Zealand who have moved to france but now want to explore unschooling with our two kids. Did you move to America to do the unschooling? We know they are more accepting of it there. We would like to start something here and would love to talk to you. Thanks, Kelly
Alban
We are already living in the US since 2014 when we started unschooling in 2017. depending on the State you choose, the laws are different and make it more or less easy to unschool. I am from France and I know some families are unschoolers too. You can find some help about it with different associations like Les enfants d’abord (LED’A), LAIA, CISE or UNIE.
You can also find a lot of useful information for the country you are interested in on this website : https://hslda.org
Giovanna
Bonjour, merci pour votre article. On voudrait faire la meme chose et partir en Asie pour 2 ans. Comment ça se passe au niveau administratif? Que faut-il dire à la DSDEN et à la mairie?
Merci d’avance
Maria
Selwa
Merci pour cet article très complet et ces belles photos.
Eva B
Avec plaisir! 🙂